• Edouard Louis - En finir avec Eddy Bellegueule

    Edouard Louis - En finir avec Eddy Bellegueule

    Trouvé à la brocante de Verteillac. L'occasion de lire un auteur dont on voit passer le nom régulièrement.

    Je suis mitigé. D'abord ce qui est positif:

    • enfin quelqu'un qui raconte le quart monde. Il faut raconter le réel. Il faut raconter les damnés du XXiè siècle et je reconnais bien dans ce que Edouard Louis raconte une certaine population souvent invisible.
    • La parole venant des personnages issus de ce quart monde en italiques pour mieux faire apparaître l'incommensurable différence.
    • un livre qui se lit bien
    • Un récit prenant où le narrateur à la première personne raconte sa jeunesse en tant qu'homosexuel au sein d'une famille pauvre, elle même caractéristique d'une classe populaire fruste et homophobe.

     

    Ce qui est négatif:

    • Une écriture trop simple et des personnages pas assez habités (il faut dire que le roman est court)
    • une confusion dans la narration, entre présent et passé.
    • Trop de parenthèses qui prennent le lecteur à témoin. Je trouve cela artificiel.
    • Des incohérences (il va en boîte à 12 ans par exemple)
    • Encore une sorte d'auto-fiction et parce qu'elle est autocentrée n'arrive pas à universaliser le propos (l'homosexualité dans une certaine catégorie sociale).
    • Des apparitions erratiques de la notion de classe. Le propos est entendable mais trop mal construit. On oscille entre le dégoût du milieu et la description des conditions sociales.

    Bref pas mal, mais je trouve que cela manque de profondeur. Tout cela manque d'épaisseur pour que ce roman, à mon avis, ne passe les années.

    [EDIT] Il s'agit bien d'une auto-fiction. (Oh le bel oxymore) Je suis alors encore plus mitigé. Qu'est-ce qui est réel? Qu'est-ce qui est fictif? Cela me navre un peu d'être celui que l'on dupe. J'en ai assez de servir de rat de laboratoire à des personnes qui jouent du réel pour en faire un objet que j'hésite pour le coup à dire littéraire.

    En fait, a posteriori, je suis en colère de lire ce genre de littérature. D'être le lecteur d'un genre où le nombrilisme rencontre le monde de l'édition. A quoi cela sert-il de rendre les frontières floues? A quoi cela sert-il à part faire un coup médiatique? Soit on fait un travail d’investigation et on en fait une étude sociologique ou un roman social. Ou alors on écrit une autobiographie (au moins le contrat est clair).

    Je ne suis pas l'analyste d'Edouard Louis.

    lien 1

    lien 2

     

    [y'en a qui l'ont lu?]

    « Bertrand Russel - Science et religion Ta-Nehisi Coates - Une colère NOIRE, lettre à mon fils »

  • Commentaires

    1
    Marie
    Lundi 20 Août 2018 à 18:35

    Alors comme tu le sais déjà je ne l'ai pas lu...

    En revanche ton ajout sur l'auto-fiction me renvoie au delphine de Vigan que je lisais à Cholet et dont c'est en partie le propos : "D'après une histoire vraie"

    Je ne saurai plus dire comment exactement elle développe le tout, j'ai trop lu depuis (haha on se demande bien à cause de qui je lis autant !) mais cela traverse l'intégralité du roman.

      • Lundi 20 Août 2018 à 19:12

        Je n'ai pas lu Delphine de Vigan, donc je ne peux pas faire de rapprochement.


        Disons, que j'ai du mal avec le principe de l'auto-fiction. Je trouve qu'il y a une question d'éthique qui n'est pas réglée. Et cette éthique n'est pas liée au propos d'un éventuel contenu (moralité, exemplarité ou non) mais au contrat avec le lecteur.
        Quand on voit en aparté le barouf médiatique qui s'en est suivi, (que je découvre aujourd'hui), la ligne de partage qui s'est faite en terme politique, je trouve cela très désagréable. J'ai un peu le sentiment d'une duperie et d'être le jouet d'une oeuvre qui s'éloigne d'un idéal artistique, où l'on mêle pour des considérations éditoriales vie privé et vie publique, où l'honneur et la dignité sont des valeurs qui se perdent. (ça fait un peu vieux con, je sais...)
        À mêler le vrai du faux, on perd en authenticité et en honnêteté.

        Finalement, cela rejoint toute une réflexion plus large sur la place de l'individu au sein de notre société post-moderne (cf Lipovetsky) où règne un certain relativisme, où on revendique une équivalence parce que de Bonne Foi, où règne le culte du Moi. Quid de de la responsabilité face au collectif?

        Mais sinon, ça se lit plutôt bien bien que malhonnête.

      • Lundi 20 Août 2018 à 19:15

        et sinon tu en as pensé quoi de ce  "D'après une histoire vraie"?

        en même temps, cela doit aussi dépendre du contenu.

    2
    Marie
    Mardi 21 Août 2018 à 20:10

    J'ai eu plus de mal à accrocher qu'avec "Rien ne s'oppose à la nuit", qui le précède. Sans doute notamment parce que je savais qu'il y avait de la fiction "sur" du réel, et que j'essayais de trouver à quels moments. Ce n'est que quand j'ai "lâché" cette quête que j'ai réellement réussi à entrer dans le livre. Que j'ai néanmoins apprécié.

     

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :